http://www.rencontre-medsuber.com/dmediafiles/biblio/2013-31.pdf
Monsieur Nasrallah,
J'ai pris connaissance de votre poster à la fin duquel vous écrivez: ''Le feu a fait perdre une superficie 20 fois supérieure dans la forêt de Tafrent qu’à Djaafra chéraga entre1976 et 1993, mais la deuxième période comprise entre 1994 et 2010 est caractérisée par des taux rapprochés dans les 2 forêts. Le préaménagement peut servir comme modèle pour limiter les dégâts des incendies.
Dans plusieurs de mes Notices évoquant préaménagement forestier, il est traité des statistiques des incendies dans notre territoire d'intervention d'alors. Vous n'en avez sans doute pas pris connaissance bien que plusieurs institutions forestières, dont la conservation de Saïda, en aient été destinataires. Il me faudra sans doute un peu de temps pour avoir sous les yeux les chiffres précis mais, sans conteste, sur la vingtaine de milliers d'hectares de la subdivision de Sidi Embarek, les incendies n'ont parcouru en moyenne entre 1980 et 1989 qu'une superficie négligeable. Les années 1990, 1991, 1992, et 1993 ont probablement été également indemnes de grands sinisttres.
Survinrent ensuite, en 1994, les gigantesques mises a`feu qui dévastèrent la forêt d'Oum Graf ( fraction importante de la forêt domaniale de Djafra Cheraga. Cette année 1994 vit environ 280 000 ha - je cite de mémoire - de formations forestières partir en fumée sur l'ensemble du territoire algérien, un record absolu probablement.
À l'été 1996 à Saïda - j'y étais de passage - les riverains des forêts reçurent le ''conseil'' de procéder rapidement à la récolte de leurs céréales arrivées à maturité des feux importants, du type de ceux de 1994, devant survenir. En définitive les incendiaires renoncèrent à leur dessein.
A. Benabdeli, utilisant la plume de A. Kefifa, estime que des considérations en relation avec les opérations de pacification on '' conduit parfois au sacrifice involontaire du patrimoine forestier'' . Si pareille expression ne renseigne pas sur les auteurs des incendies et sur leur motivation réelle, il ne fait par contre aucun doute que les petits sinistres relevés entre 1980 et 1987 avaient tous la même origine: le personnel du secteur forestier ou leurs familles. À cet égard et à titre d'exemple, le gardien du poste vigie de Berrah, de la tribu des Krarcha, s'est distingué par les mises à feu qu'il provoquait et, grand propriétaire d'ovins, par lle pastoralisme spéculatif qu'il pratiquait au mépris de la légistation et au détriment de la forêt.
Les recherches sur les dispositifs de lutte contre l'incendie dans le cadre du préaménagement sont demeurées inachevées du fait que K. Benabdeli et ses comparses ont dissous le projet Pineraie dans la précipitation et aussi dans la violence.
Brièvement, le dispositif imaginé reposait sur les soubassements suivants:
- Compartimentage des massifs - d'une manière orthogonale ou non rectiligne selon la topographie,
Nota
Les responsables régionaux et locaux du secteur forestier se sont continuellement opposés à la constitution, en forêt de Tafrent d'un terrain de démonstration pour la version non rectiligne de la méthode de préaménagement. En définitive ce sera en forêt de Baïnem que le modèle sera installé en 1993 et 1994 sur une surface réduite (250 ha) mais représentative des terrains forestiers pentus. Cette fois aussi l'expérience sera interrompue le 31 décembre 1994, sur ordre verbal et sans crier gare comme à Saïda mais sans violence.
La première tentative d'aménager réellement les forêts d'Algérie eut lieu en 1968 dans la forêt domaniale de Senalba Chergui et la dernière en 1994 dans la forêt domaniale de Baïnem.
Les cadres du secteur forestier d'Algérie - universitaires compris - ont prohibé pour l'éternité l'aménagement et la sylviculture; il est bien écrit pour l'éternité. Ils ont par la même occasion condamné la forêt algérienne à la disparition rapide.
Grim, ingénieur civil des eaux et forêts (à suivre)