Pour ce ministre suivre l'évolution des réserves de change revient à faire montre d'un esprit rentier.
C'est probablement pour combattre ces esprits rentiers que les pouvoirs publics renoncent à faire connaître le montant du matelas de devises dont dispose l'Algérie.
Dans son intervention le mot réforme revient de très nombreuses fois, de même que il faut. Du déjà lu et entendu depuis des années et des années.
La résurgence d'une industrie mise à mal depuis les années 1990 de même que la promotion des exportations hors hydrocarbures constitue pour le ministre - comme pour nombre de ses prédécesseurs- des impératifs premiers.
À ce sujet, notre métier de forestier nous invite à nous préoccuper d'abord des domaines ligneux et subéricole.
- Pour ce qui est du bois, les autorités peuvent-elles amener la hiérarchie forestière à faire connaître l'état réel du patrimoine forestier naturel - dont on dit parfois qu'il s'étend sur environ 4 millions d'hectares - et la consistance des reboisements qui couvriraient semble-t-il 1 million d'hectares complantés depuis 1962?
Peut-on connaître le volume ligneux correspondant à ces étendues et, par rapport à ce volume,la quantité annuellement exploitable?
Sur la base du programmes d'aménagement envisagé, il avait été édifié - à notre initiative dont nous maintenons le bien-fondé - deux usines de panneaux de particules à base de bois locaux d'une capacité de 30 000 m3 chacune, la première à Djelfa et la deuxième à Telagh. Ces deux unités ont été démantelées pour des raisons jamais exprimées. Est-on disposé à contraindre la hiérarchie forestière à faire son travail qui comprend une contribution à la mise en place d'abord d'une industrie du bois et, dans une deuxième phase, à une industrie de la pâte à papier à base de bois?
- Le liège produit des pays circum-méditerranéens constitue le produit facilement exportable par excellence compte tenu du fait que l'arbre dont il est issu ne se développe que sur une partie très réduite de la planète. Dans la première moitié du XXe siècle, la production subéricole dépassait annuellement les 300 000 quintaux quant elle n'atteint péniblement qu'une centaine de milliers de quintaux aujourd'hui.
La forêt de chêne liège d'Algérie périclite continuellement du fait des incendies, du surpâturage, des défrichements, du non renouvellement de peuplements surannés, des démasclages malavisés. Depuis des années la hiérarchie forestière promet de remédier à l'amenuisement des suberaies...sans résultat.
La réhabilitation des forêts de chêne liège passe obligatoirement par leur aménagement ce à quoi les responsables se refusent obstinément.
Si par exemple au secteur des produits de la terre il est permis de se maintenir dans l'irresponsabilité, la nonchalance, la prévarication, d'où proviendront ces exportations hors hydrocarbures dont on nous rebat les oreilles depuis si longtemps?
Au XVIIe siècle, sous le règne de Louis XIV, la France se retrouve face à un important déficit en bois de qualité plaçant en danger sa construction navale. Une enquête permit de mettre en lumière une corruption de grande ampleur au sein de l'administration forestière d'alors qu'on appelait les Maîtrises des eaux et forêts. Aidé d"inspecteurs intègres, à l'image de Louis de Froidour, le ministre en charge du secteur, Jean-Baptiste Colbert, tailla dans le vif et n'hésita pas à révoquer la totalité des Maîtres des eaux et forêts. Le recrutement ultérieur de forestiers respectueux de l'éthique professionnelle permit d'entreprendre le redressement d'une situation alarmante.
Pour son malheur, l'Algérie forestière d'aujourd'hui ne possède ni son Colbert, ni son Froidour.